L’Épée de Vérité

L’Épée de Vérité, ou plutôt « The Sword of Truth », est une série de bouquins écrits par Terry Goodkind. Chaque livre est un bon gros pavé contenant une histoire complète pouvant se lire indépendamment des autres livres, bien que pour une bonne compréhension des intrigues, il vaille mieux lire dans l’ordre de parution…

Même s’il s’agit bien d’heroic fantasy pur sucre, le talent de Goodkind est de rendre cela épique, prenant et de nous emmener dans un monde toujours plus vaste. Le héros accumule les destinées mystérieuses, les magiciens et ensorceleuses pullulent et les méchants sorciers crèvent comme des mouches. L’histoire paraît et est bien d’un classicisme des plus absolus avec des descriptions longues, un auteur qui aime visiblement planter le décor, des personnages bien typés et une intrigue téléguidée et malgré tout ça, on accroche. Ça doit être ça la touche « Goodkind ». Ce petit quelque chose qui nous donne envie de savoir la suite, de savoir comment le scénario va s’imbriquer dans la trame globale de l’univers de The Sword of Truth. Avec un autre auteur, c’est une bouillie infâme, avec lui ça passe tout seul.

Difficile à aborder, cette série est clairement orientée vers un public adulte. L’auteur ne recule pas devant quelques scènes de meurtres, de tortures ou de viols. Leur monde est violent et ça se lit. Plusieurs passages décrivent les pensées et les phases d’introspection des personnages et sont presque de la philosophie. En bref, c’est pas ce que je recommanderais à quelqu’un qui ne connaît pas ce genre littéraire.

Ces aspects philosophiques ont déjà été reliés avec le courant de pensée appelé objectivisme, très populaire aux Etats-Unis, initié par Ayn Rand. Pour avoir lu The Fountainhead (La Source Vive) de Rand concidéré comme un ouvrage fondateur de l’objectivisme, on ne peut pas s’empêcher de faire le parallèle avec Faith of the Fallen de Goodkind. Les deux héros construisent chacun une oeuvre pour l’édification de leurs semblables et sont tous deux obligé de la détruire à cause de la vilenie de ceux-ci. Cette inspiration se ressent tout le long de The Sword of Truth à travers les ennemis diaboliquement maléfiques, les héros à la perfection impossible, ayant une abnégation et un sens du devoir et de la chose raisonnée parfaitement ridicule. Cela se ressent aussi à travers l’opposition des pays « libres » face à un empire pseudo-soviétique. Cette vision simpliste et naïve a le don de m’énerver et me donne envie régulièrement de claquer le héros mais ce défaut est pardonnable dans un ouvrage de fantasy, cette conception de l’intrigue et de l’univers étant particulièrement commune dans ce genre là — à l’inverse par ailleurs je n’apprécie vraiment pas l’objectivisme de Rand, son apologie d’un individualisme féroce et forcené, son refus de reconnaître l’homme avec ses qualités comme ses défauts.

C’est ainsi que malgré quelques passages donnant des envies de meurtres sur la personne du héros, The Sword of Truth a réussi à me captiver et à me faire dévorer les quelques mille pages de chaque opus sans sourcilier. Une série que je ne recommanderais pas à ceux qui ne sont pas fans de heroic-fantasy mais qui est définitivement à lire au moins une fois pour les autres.